Quoi de neuf ? Les fleuristes. Il fallait bien que cela arrive. Les boulangers, les pâtissiers, les bouchers, les droguistes, les marchands de fruits et légumes se sont bien tous réinventés, les uns après les autres. Voilà le fleuriste devenu à son tour un peu arty, un peu créateur, un peu conceptuel. Assez pour paraître branché. Assez pour séduire tous les trentenaires créatifs en quête d’activités « qui ont du sens ». Voici les nouveaux « artisans-artistes ». Fleurs exotiques, fleurs rares, fleurs oubliées et même fleurs séchées constituent leur palette.
Comme tout acteur de son temps, le fleuriste d’aujourd’hui est aussi un peu slasheur. A côté de ses fleurs, on peut trouver des cafés sourcés ou des boissons infusées, de la déco responsable ou de l’alimentation éthique. Et les bouquets sont, bien sûr, livrés en vélo… Comme autant de signes émis de contemporanéité cool et responsable. Les noms des échoppes ont bien sûr été l’objet d’intenses séances de brainstorming : Racine, Marguerite, Bergamotte, Odorantes, Peonies, Moor, Castor, Nue, Portefoin, Désirée… L’important est de donner à ses clients le sentiment de pénétrer, non pas dans un magasin, mais dans un univers poétique et décalé.
Car les fleuristes d’aujourd’hui n’ont pas suivi les mêmes formations que leurs aînés et ne maîtrisent pas, comme eux, l’art du bouquet. Au contraire. Leur ambition est même de le désacraliser pour le rapprocher de la vie quotidienne et le sortir des seuls rendez-vous de la Toussaint, la Saint Valentin et la fête des mères. On ne parle d’ailleurs plus de bouquets, mais d’arrangements. Quant aux sites les plus pointus, ils évoquent, eux, des « bouquets de rien », faits de trois tiges et d’une feuille rigoureusement choisies. Disposer plusieurs mini-bouteilles (quand ce ne sont pas des tubes à essais…) contenant chacune une fleur est rapidement devenu un cliché du moment sur les réseaux.
Les fleurs viennent ainsi à leur tour nous parler de nous. De notre envie de nous reconnecter à une nature vivante, d’arranger le monde à notre convenance, d’exprimer notre différence de manière créative. Voilà les poètes de retour. Sous les pavés, la nature. Les marques ne s’y sont pas trompées : après Princesse Tam-Tam et le fleuriste Bergamotte, Armor Lux vient d’imaginer une collection capsule avec la chaîne de jardineries Truffaut…