L’affaire est entendue : chacun attend désormais des marques qu’elles s’engagent pour un combat plus grand que leurs offres et l’engagement est devenu le refrain le plus repris du moment. Engagement façon #MeToo, LGBT et inclusivité pour les plus en pointe. En faveur de l’environnement, de l’égalité et de la solidarité pour les plus classiques. Dernier engagement en date, celui de la maison Danone qui a décidé de remplacer la mention « à consommer jusqu’au » par « à consommer de préférence avant le » sur les emballages de la plupart de ses produits laitiers en France et en Belgique.
Avec cette décision, le groupe veut d’abord rappeler l’idée que nombre de ces produits restent parfaitement sûrs même quand leur date limite est dépassée de quelques jours. Le contrepied de plus de cinquante années d’habitude qui ont condamné beaucoup de produits innocents à la poubelle au prétexte du risque qu’ils représentaient. Une petite révolution culturelle. Cette substitution d’une date de durabilité (Best by) à une date limite de consommation (Best before) est aussi un signal fort émis par Danone pour prouver son engagement dans la lutte contre le gaspillage alimentaire, au même titre que Saint Moret ou La Vache qui Rit et leurs conseils on-pack conçus avec Too Good To Go.
Enfin, ce glissement sémantique en dit beaucoup plus qu’il n’y paraît sur la relation entre les marques et leurs consommateurs et, plus particulièrement, sur le rôle joué par chacun d’eux. L’irruption du mot « préférence » ne signifie-t-elle pas d’emblée l’acceptation du libre-arbitre du consommateur ? Ici, Danone rompt avec le modèle de la marque-parent, qui vient rappeler aux enfants les interdits, pour endosser celui de la marque-adulte qui s’adresse à des pairs responsables. Il était temps. La société de consommation est bien à un moment charnière que les crises actuelles (tant écologiques que sanitaires) viennent révéler. Chacun a désormais pris conscience que les marques ne sont plus les seules à fixer les limites à ne pas dépasser et qu’elles ne pourront pas changer le monde sans le soutien et la participation des consommateurs. Que vaut le désir d’engagement des marques sans la volonté d’agir de leurs acheteurs ?